La pratique d’un art martial peut répondre à un besoin d’exprimer ou de canaliser son énergie. L’Aikiryu, forme d’Aïkido, invite à aller rencontrer sa propre violence intérieure. Une femme a aussi une énergie de défense, de conflit, d’opposition qui a besoin de s’exprimer à l’intérieur d’elle. L’Aikiryu est-il pour autant féministe ? Témoignage d’Urielle Abelé, enseignante.
La connaissance du corps
La pratique de l’Aïkiryu m’a appris à choisir en conscience à quelle distance je me positionne dans la relation à l’autre. De sentir en moi, quand l’autre est trop proche, quand je suis plus à l’aise dans telle situation.
Cela m’a appris la vigilance du toucher physique. De choisir qui, à quel moment et où l’autre entre en contact avec mon corps. A travers les techniques de cet art, j’affine ma perception de moi et de l’autre.
Cela m’a appris à conscientiser mon centre dans mon bassin. Cet ancrage puissant qui stabilise mon état d’être intérieur et me permet de ne pas être trop déstabilisée par la vie.
Cela m’a donné confiance en mon corps, en ses capacités physiques de réaction, de défense, d’attaque, de création d’une harmonie dans la relation, d’adaptation et de guidage de l’autre.
Saisir tant de corps différents m’a donné confiance en ma capacité à être en contact avec le corps de l’autre. La répétition des saisies dans les cours m’a donné de l’expérience qui m’assure ma capacité à réagir à ce que fait l’autre corporellement.
L’affirmation du consentement
La progression dans cet art martial a affiné la conscience de mon intégrité corporelle et de sa préciosité. C’est comme si mon affirmation intérieure appelle un réel respect de mon corps et qu’inconsciemment on ne peut me toucher sans mon accord.
Cela fortifie le consentement mutuel, en tout cas la nécessité du mien.
Cela m’a permis de muscler l’affirmation de qui je suis. Je sens mon corps stable, souple et agile pour interagir dans ce monde.
Cela a fortifié ma souveraineté en tant que femme. Je peux choisir avec qui je suis en interaction, qui entre en contact avec moi.
Cela m’a aidé à briser l’illusion d’impuissance physique, l’illusion de soumission et d’incapacité.
Renforcement de la résilience
Cela a fortifié ma résilience. Chuter, se relever des centaines de fois dans un cours a permis à mon corps et à mon esprit d’engrammer cette capacité de vie. Je crains moins de chuter car je sais que je suis capable de me relever.
Est-ce que l’Aïkiryu est un art martial féministe, dans le sens où il contribue à transformer les rapports de force dans notre société entre les femmes et les hommes ? Je dirai oui !
U.A enseignante au sein de l’école